Ce sont les entreprises et non Pôle Emploi qui créent des emplois...

Tribune publiée dans les Echos le 02/07/2013 / PDF : http://www.lesechos.fr/pdf.php?id=581539

Exonérer, sous conditions, les entreprises de cotisations patronales pendant la période d’essai lors d’une embauche en CDI permettrait de créer des dizaines de milliers d’emplois. Et cela ne coûterait pas forcément plus cher à l’Etat…
  

Pour réduire les files d’attente au Pôle Emploi, la solution n’est pas d’embaucher des conseillers supplémentaires. Si la mesure permettra sans aucun doute aux personnes à la recherche d’un emploi de se sentir mieux considérées - et c’est déjà par mal ! - cela ne règlera pas le problème du chômage. Au Pôle Emploi peut-être, mais pas en France. Car ce sont les entreprises, et non les conseillers, qui créent des emplois…

J’ai 30 ans, je suis dirigeant d’entreprise depuis 10 ans. Les entreprises que j’ai créées sont spécialisées en innovations pédagogiques et emploient 40 personnes (ETP). Comme tous les dirigeants d’entreprise, je fais de mon mieux pour développer mon entreprise tout en m’assurant que mes équipes sont épanouies et qu’elles développent leurs compétences. Souvent, les deux vont de pair. En cette période plus compliquée économiquement, chaque décision de recrutement en CDI est soigneusement pesée...

La France étant un vieux pays conservateur,  voici une idée simple à mettre en œuvre pour favoriser l’emploi, sans trop bousculer les mentalités.

Lorsqu’une entreprise embauche un nouveau collaborateur en CDI, elle doit le former et l’accompagner pour le faire monter en compétences. Les formations proposées par le Pôle Emploi, souvent généralistes, obligent les employeurs à investir dans une formation spécifique, propre à leur métier, lors d’une embauche. Cependant, même si c’est coûteux, former un nouvel embauché est la condition sine qua non pour l’entreprise de se donner toutes les chances de ne pas avoir procédé à un recrutement pour rien…


Durant cette période « d’essai », le salarié valide qu’il a fait le bon choix et l’entreprise valide pour sa part que sa nouvelle recrue a les compétences attendues pour le poste. Ainsi, pendant quelques mois, le nouvel embauché coûte souvent bien plus qu’il n’apporte à l’entreprise, sans que cette dernière ait la certitude que ça va fonctionner ou que le collaborateur ne va pas partir à l’issue de sa formation.


Mon idée est simple : ne laissons plus aux entreprises la seule charge du risque pris lors d’une embauche en CDI. Comment ? Tout simplement en exonérant, sous conditions, les entreprises de cotisations patronales pendant la période d’essai (qu’on pourrait aussi appeler « période de formation » en réalité). À l’issue de cette période, trois cas de figure possibles :   


1. L’employeur ne souhaite pas garder le nouveau collaborateur car il ne répond pas aux exigences du poste. Dans ce cas, l’entreprise devra s’acquitter des cotisations dont elle a été exonérée. Cela évitera ainsi à certains employeurs indélicats de multiplier les embauches en CDI non concrétisées.

2. Le nouvel embauché ne souhaite pas rester dans l’entreprise pendant sa période d’essai. Dans ce cas, l’entreprise, qui a investi dans sa formation, n’aura rien à rembourser.

3. L’entreprise et le nouveau collaborateur sont tous les deux satisfaits et l’essai est transformé. L’entreprise a amorti les pertes des premiers mois grâce aux allègements de charges, le nouvel embauché a pu monter en compétences grâce à la formation qu’il a reçue et l’Etat compte un chômeur de moins à indemniser. Un pari « Gagnant – Gagnant – Gagnant ».


C’est là une proposition simple et concrète pour favoriser l’emploi de tous, mais surtout l’emploi de ceux qui ont le plus de difficultés à accéder au marché du travail. Car plus une personne a un faible niveau de compétences, plus l’entreprise doit investir pour faire en sorte que sa productivité marginale dépasse son coût marginal.


Une telle mesure ne coûterait pas plus cher à l’Etat et ne créerait aucune précarité supplémentaire, au contraire ! En l’adoptant, l’Etat donnerait simplement aux entreprises les moyens de prendre le risque de réussir et montrerait qu’il peut être tout autant du côté des salariés que des employeurs…